Dans son rapport rendu public ce jeudi matin sur la tragédie de L’Isle-Verte, le coroner Cyrille Delâge critique les opérations des pompiers lors de l’incendie et déplore le personnel insuffisant et mal formé pour des urgences comme celle survenue à la résidence pour personnes âgées.
De plus, selon lui, des personnes non autonomes n’auraient pas dû être logées dans une section de la Résidence du Havre qui n’était pas conforme aux règlements et normes de construction pour ce type d’habitation.
En ce qui a trait au travail des pompiers, M. Delâge a relevé le délai relativement important concernant leur intervention et surtout la demande tardive des renforts auprès des municipalités adjacentes. Le chef pompier avait attendu d’être sur les lieux de l’incendie avant d’appeler des renforts, même s’il savait qu’il s’agissait d’une résidence pour personnes âgées, dont plusieurs se déplaçaient avec difficulté, et qu’il avait été avisé qu’elles étaient coincées à l’intérieur.
Le coroner est particulièrement critique à l’endroit du travail du gardien de nuit Bruno Bélanger.
« On sait comment il s’est comporté avec le résultat que l’on connaît : il n’avait jamais participé à un exercice d’évacuation et a invoqué le “protocole” pour justifier les gestes qu’il a posés et l’absence de toute tentative pour sauver les résidents », est-il mentionné dans le rapport.
Me Delâge a également critiqué le travail du chef pompier Yvan Charron.
C’est donc la réunion de nombreux facteurs, en période hivernale de surcroît, qui a conduit au tragique résultat, estime le coroner.
Recommandations
Dans le document de 135 pages déposé le 23 janvier au bureau de la coroner en chef, le coroner Cyrille Delâge fait de nombreuses recommandations pour améliorer la sécurité de la population.
Il souligne que les règles de sécurité doivent être améliorées dans les résidences pour personnes âgées.
Les bâtiments doivent être conformes aux lois et règlements actuels en matière de sécurité incendie. Ils doivent donc être munis de gicleurs automatiques, mais aussi de détecteurs de chaleur et de fumée audibles et visibles tant par le résident que par le personnel et reliés à une centrale d’alarme. Le système d’alarme doit être relié au réseau 911 de la région.
Le coroner exige également que les propriétaires de résidences fournissent la confirmation que leurs préposés ont tous suivi une formation en matière de sécurité incendie et d’évacuation.
Réactions
La ministre de la Sécurité publique, Lise Thériault, assure que tous les ministères interpellés dans le rapport vont prendre le temps d’examiner les recommandations de Me Delâge.
« On a déjà commencé avec la formation des pompiers volontaires. On a annoncé une enveloppe de 19,5 millions sur les cinq prochaines années. Il y a une clause qui regarde la formation pour les pompiers qui ont des clauses grand-père. Je pense qu’on peut regarder ça rapidement », a-t-elle affirmé.
Le premier ministre Philippe Couillard aussi a réagi. Il promet que son gouvernement va prendre des mesures très prochainement. « Il y a clairement des choses qui doivent être faites, qui ont déjà été faites mais qui doivent être poursuivies. On a parlé il y a quelque temps des gicleurs pour les résidences existantes. Il y aura d’autres gestes également », a-t-il souligné.
De son côté, l’Agence de la santé et des services sociaux du Bas-Saint-Laurent, qui est visée par cinq recommandations, a fait savoir qu’elle accueille favorablement le rapport, et que certaines de ses recommandations sont déjà en application.
En janvier 2014, l’incendie a ravagé durant une nuit glaciale la Résidence du Havre, située dans la petite municipalité de L’Isle-Verte, au Bas-Saint-Laurent; 32 personnes âgées ont alors perdu la vie.
Durant l’enquête du coroner, tenue pendant huit jours en novembre et décembre 2014 à Rivière-du-Loup, une soixantaine de témoins ont été entendus.
La cause de l’incendie n’a pu être déterminée, en raison de l’état de destruction avancée des lieux.
Dans son rapport, le coroner mentionne que pour l’instant, il estime qu’il s’agirait d’un incendie de nature accidentelle. « Nous disons “pour l’instant” parce que, tant et aussi longtemps que le point d’origine et la cause la plus probable d’un incendie ne sont pas scientifiquement ou objectivement établis, on ne peut éliminer l’incendie volontaire, bien que rien ne nous dirige vers cette éventualité », est-il écrit.
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