L’Alzheimer est une maladie qui touche près de 800000 personnes chaque année en France.Si cette maladie est désormais un problème de santé publique il reste néanmoins encore du chemin à parcourir dans son acceptation et sa prise en charge. A l’occasion de la journée contre la maladie d’Alzheimer qui a lieu aujourd’hui,nous sommes allées à la rencontre du Docteur en neurologie Bernard Croisile. Il a accepté de répondre à une série de questions que peuvent se poser un certains nombres de personne concernées de près ou de loin par cette maladie.
1. “Comment éviter la maladie d’Alzheimer “?
Quel mode de vie adopter par exemple (alimentation, activité mentale et physique…)
Nous savons maintenant qu’il est possible, non pas d’empêcher le développement d’une maladie d’Alzheimer mais de retarder sa survenue de quelques années. Une forme de prévention est donc possible, celle-ci repose sur ce que j’appelle le « carré d’as » : avoir une hygiène alimentaire saine (régime crétois), dépister et traiter les facteurs de risque cardio-vasculaires (hypertension artérielle, diabète, cholestérol, obésité, tabagisme), maintenir une activité physique régulière (marcher 30 minutes chaque jour, monter les escaliers, faire du vélo ou de la gymnastique), et enfin entretenir un mode de vie mental actif et stimulant (bon réseau social et loisirs intellectuels tels que lectures, voyages, radio et télévision, jeux de société, jeux informatiques). Les loisirs et les occupations mentales développés tout au long de la vie, et même après la retraite, renforcent certaines capacités cognitives (concentration, rapidité mentale, planification, initiatives). La maladie est retardée car l’enrichissement des connexions synaptiques et la création de nouveaux neurones (qui peut se faire à tout âge) accroissent la tolérance aux lésions neurodégénératives et reculent le seuil de découverte clinique de la maladie.
2. “J’ai 40 ans et des trous de mémoire, dois je m’inquiéter “?
Quels sont les premiers signes de la maladie d’Alzheimer ? Comment distinguer les troubles courant des troubles révélateurs
A 40 ans, hormis les formes héréditaires lors desquelles la moitié de la famille débute une maladie d’Alzheimer au même âge, les « trous de mémoire » ne correspondent jamais au début d’une maladie d’Alzheimer. A cet âge, les plaintes mnésiques correspondent aux difficultés banales liées au vieillissement naturel : rechercher un nom propre, se perdre lors de trajets nouveaux, être imprécis quant aux détails ou à la date exacte d’événements personnels récents, ne plus savoir où est garée sa voiture ou bien si l’on a fermé sa porte à clé, avoir oublié ce qu’on est venu faire dans une pièce, être obligé de noter ses rendez-vous ou la liste des commissions. Il s’agit plus de plaintes que de troubles réels, car la personne remarque elle-même ses oublis qui l’inquiètent mais son autonomie reste parfaite, même si elle doit mettre en place des « béquilles mnésiques » (agenda, pense-bête, liste écrite…).
En revanche, il faut s’alerter dans les situations suivantes : oublis de ce qui vient d’être dit après quelques minutes, oubli d’événements personnels récents et importants (fêtes de famille, visites d’amis), perte répétée d’objets courants, être gêné lors de la réalisation d’activités préférées au point de les abandonner (bricolage, jardinage, jeux de société), se perdre lors de trajets familiers. Le patient a tendance à nier ou sous-estimer ses oublis qui sont surtout remarqués par son entourage.
3. « La maladie d’Alzheimer est-elle héréditaire ? »
Il est exceptionnel que la maladie d’Alzheimer soit héréditaire. En France, sur les 700 000 personnes ayant une maladie d’Alzheimer, on estime qu’un millier seulement (0,14% des cas) aurait une forme héréditaire secondaire à une mutation sur un gène. Il s’agit alors d’une hérédité autosomique dominante, c’est-à-dire que la moitié des membres de ces familles est porteuse d’une mutation sur un gène présent sur les chromosomes 21, 14 ou 1. Tous ceux qui ont la mutation développeront la maladie et la transmettront à la moitié de leurs descendants. Ceux qui n’ont pas la mutation ne feront pas la maladie et ne la transmettront pas à leurs enfants.
L’âge de début de ces formes familiales de maladie d’Alzheimer varie selon le chromosome, le plus souvent entre 35 et 65 ans.
Les autres cas de maladie d’Alzheimer ne sont pas héréditaires mais pourraient être parfois favorisés par des facteurs de susceptibilité génétique qui sans entraîner obligatoirement la maladie, la rendraient un peu plus fréquente.
Pour ce qui est des jumeaux, lorsqu’un vrai jumeau a une maladie d’Alzheimer, l’autre la développe dans environ 70 % des cas, alors que le chiffre est deux fois moindre chez les faux jumeaux.
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Retrouvez le livre du Docteur Bernard Croisile “Accompagner la maladie d’Alzheimer et autres troubles apparentés“ aux éditions Larousse.
Bernard CroisileNeurologue des Hôpitaux
Service de Neuropsychologie Hôpital Neurologique 5 Bd Pinel 69677 Bron cedex |